Carrare le 15.8.85
Sous-titres d'une séquence  de: "Au pays de l'or blanc ...", la video.

Tout dépendait de lui.
Il entra dans la maison comme un héro western avec son chapeau ses bottes et un halo de poussière lumineuse dans l’encadrement surexposé de la porte.
Nous avions attendu dans la cuisine où sa femme nous avait offert du fromage et du vin de pays et d’où nous avions contemplé par la fenêtre, les pans étincelants de la carrière de marbre toute proche, que nous venions de visiter Cesare, Mario et moi. Ce que nous cherchions était plutôt inattendu: un monolithe de 60 tonnes de marbre.
Mario est expert dans la taille du marbre et Cesare dans la mise en caisse des sculptures, mais aucun de nous n’arrivait à reconnaître la qualité du marbre quand il était dans la carrière. Un jeune homme en bleu de travail nous avait donné un tuyau d’arrosage pour mouiller la paroi et voir davantage les veines, mais ça n’avait servi à rien, seul le patron de la carrière pouvait s’y reconnaître.
Tout dépendait de lui.
Il est entré dans la cuisine et m’a serré la main aussi discrètement qu’il avait gardé la bouche fermée comme pour ne pas faire étalage de ses dents en or, puis disparut. J’en ai profité pour demander à Cesare le nom de son frère: « Giustino » me répondit-il.
Giustino est revenu, il était douché et avait perdu son chapeau et ses bottes, il s’assit. Mario le premier entreprit d’expliquer à Giustino le projet de sculpter une voiture américaine en marbre et que ne pouvant pas me payer le bloc de marbre j’avais trouvé quelques amateurs pour investir dans le projet et partager avec moi les bénéfices de la vente. Je n’avais pas trouvé assez de fonds pour payer tout le bloc, serait-il intéressé d’investir dans le projet avec de la pierre ?
Mario est entré dans les détails que la vitesse de mon écriture m’empêche de rapporter.
Justino montra de l’or pour la première fois :
_Est-ce que le marbre de ma carrière convient au projet ? Cesare répond qu’il était difficile de reconnaître le marbre quand il fait partie de la montagne, que nous cherchions un « arabescato » à fond blanc et pensant que son frère n’avait pas suivi les explications de Mario, il repris tout à nouveau, il a même dit dans un dialecte que je ne comprenais pas qu’il allait faire la caisse d’expédition  pour New York, en participation.
La pièce était complètement irréelle, alors que toutes les cuisines du monde sont éclairées par le haut, celle-ci l’était par la carrière en bas agissant comme un énorme réflecteur. Les visages aussi étaient éclairés par la super table en marbre qui aurait été splendide taillé en forme de Cadillac grandeur nature. Sur les murs beaucoup de piété, quelque part un téléphone et une casserole qui mijote sur une gazinière la frigidaire trop récente ne mériterait pas qu’on le taille dans le marbre. Le sol est un damier en marbre noir et blanc, comme un échiquier et au nombre restreint de personnages en présence on pouvait dire que la partie était presque jouée. Justino semblait perdre intérêt aux explications de Cesare et moi je perdais mon temps, il acceptait certainement toute proposition formulée par son frère et l’en tiendrait responsable au cas où cela foirerait, il interrompit Cesare :
«Est-ce que mon marbre convient? »     
« Est-ce qu’on pourrait un marbre comme celui-là ? » Fis-je en montrant la table.
« Ce marbre provient de la partie gauche au deuxième niveau », dit-il en pointant l’index par la fenêtre ( Aouhw ! Quelle vision.): « Demain je vous apporterai des échantillons. »
Je me levai pour dire au revoir quand je m’aperçu que le jeune homme de la carrière était là lui aussi, ce devait être le fils de Giustino. Il arborait un tee-shirt « I love N.Y. » et souriait avec complicité.
Quand j’arrivai à l’atelier le lendemain, deux petits échantillons de marbre frais m’attendaient, la première partie était jouée et le projet de la Cadillac en marbre gagnait.

 

Au pays de l'or blanc, English subtitles

Everything depended on him.
He entered the house as a western hero with his hat, boots and shiny dust around him in the overexposed frame of the door.
We had waited for him three quarters of an hour and from the kitchen where his wife had offered us wine and cheese, we contemplated the huge vertical white wall of the marble quarry that Mario, Cesare and I had just visited.
What we were looking for was rather unusual: a 45 tons monolith of marble. Mario is an expert in carving the marble and Cesare inexpert in crating sculptures. But none of us can recognize the right marble in a quarry. A young man in blue overalls gave us a hose, wetting the surface makes the veins appear. But only the owner could find himself in his own quarry.
Everything depended on him.
He entered the kitchen and shook my hand as discreetly as he kept his mouth shut. He obviously did not want to show off his golden teeth. His face is rough and his eyes well hidden behind a thoughtful face. He vanished from the kitchen, it was a good opportunity to ask Cesare his brother' s name: Giustino. Justino came back; he had lost his hat, his boots and had showered. He sat down.
Mario first started explaining to him that I had the project to carve an American car in marble and not having the funds to buy the block, I had found some art lovers to invest in the project with the benefit of sharing the profit. I did not find enough investors to pay for the whole block; would he be interested in investing in the project with stone? Mario took his time to get into details, which the speed of my writing does not allow. For the first time Giustino showed gold: he asked Mario if his marble at the quarry is convenient for the project. Cesare answered that it's hard to tell since none of us are experts in recognizing marble when we see it in the mountain. We are looking for an "Arabescato" with white background. He's not sure that his brother understands
Mario's proposition. He had to explain it ail again, and in a dialect that I did not understand he told him that he was ready to crate the work for a share in the profit. He went on forever; Justino was losing interest and I was losing my time.The light in the kitchen had something unreal; instead of being lighted from above like. any kitchen in the world, this one was lighted by the quarry below like from a huge reflector. The faces were lighted by the super marble table in a marble that would look great shaped as a Cadillac. On the walls were lots of religions, a phone somewhere, some medicine next to it. The refrigerator is not worthwhile to be carved in marble. The floor is a chessboard and considering the amount of pawns left, we are at the end of the game. It seems that Justino would accept any offer coining from his brother and hold him responsible if anything goes wrong. He was losing interest and interrupted Cesare:
"Is my marble convenient?" "Can we get this kind of marble?" I asked, pointing to the table. "This table plate is from the left side of the second level," he said, pointing out the window. "Tomorrow l'll get you some samples."
I stood up to say goodbye and saw that more people were around. The kid of the quarry is obviously Giustino's  son; he has an "I love N.Y." tee shirt and smiles with complicity.
The next day I went to the workshop. Two samples of fresh marble were expecting me, whispering that the first game was played and the marble Cadillac project is winning.

 

 

 

     
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